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31 juillet 2006
Jean-Marie Le Ray: pour vraiment parler à vos utilisateurs
Peux-tu te présenter en quelques mots et nous parler de ton parcours professionnel ?
Jean-Marie Le Ray, 49 ans. Bordelais de naissance, expatrié dès la fin des années 70, après différents séjours à Londres, en Espagne et en Australie, je me suis fixé à Rome en 1986. Traducteur anglais-italien-français et interprète professionnel italien-français depuis 20 ans, 100% autodidacte et reconnu dans ma profession : à ce jour, j’ai personnellement traduit plus de 40 mille pages dans une quarantaine de domaines. Ça va des poésies de Jean-Paul II au système pour la collecte, le transfert et le stockage des données de vol des projets spatiaux ARIANE IV et V, du duo Ramazzotti-Anastacia à l’interférométrie, de l’intelligence artificielle aux machines-outils en passant par les avions, les bateaux, les assurances, la comptabilité, le droit, etc. Sans compter les milliers d’autres dont j’ai supervisé les projets… L’heure est venue d’évoluer.
En parallèle, j’ai monté en 1989 ma société de traduction-interprétation, le Studio 92 Snc, toujours en exercice 17 ans plus tard. Devise : le français de qualité ! Une TPE artisanale avec à sa tête un artisan-traducteur-interprète : sur mesure et amour de la belle ouvrage.
Quelle est ta recherche aujourd’hui ?
Ma recherche part d’un simple constat : avec ma longue et riche expérience, j’ai quelque peu l’impression d’avoir fait le tour du sujet. Le sur-place, un peu ça repose, beaucoup ça fatigue, d’où l’urgence de « mettre un frein à l’immobilisme », Coluche dixit. Je ressens de moins en moins le stimulus intellectuel nécessaire pour progresser. D’autant qu’en traduisant, ce n’est plus vous qui écrivez : traduire est un exercice de style où vous devez rédiger … avec les mots des « autres » ! Pas banal, hein ? Or les « autres » s’expriment plutôt mal, qu’ils soient ingénieurs ou avocats ne change rien à l’affaire, ils jargonnent à tout-va. Ce sont d’abord des experts, des techniciens, pas des rédacteurs. Souvent mon métier consiste à mettre une pièce ici, à réparer un accroc là, etc., pour transformer le document source, trouble, en texte final limpide, le plus potable possible, fruit de l’inévitable compromis propre à toute quadrature du triangle. Aux antipodes de la création, ce n’est pas satisfaisant. Ajoutez-y l’avènement d’Internet, qui a tout bouleversé…
Tu as ouvert un blog. Depuis quand le tiens tu et pourquoi t’es tu lancé dans cette démarche ?
En fait, j’en ai ouvert plusieurs. Je tiens celui-ci depuis mars 2005, créé dans le sillage de mon site pro pour conjuguer la dynamique du blog à la staticité relative du site, proposer une vitrine de mon savoir-faire, et traduire enfin à mes conditions : ce que j’ai envie, comme et quand j’en ai envie, sans contraintes de temps ni d’argent. Le but initial était de partager les ressources d’éditeurs anglo-saxons (sur Internet ils ont toujours plusieurs longueurs d’avance sur nous) avec des lecteurs francophones. Interrompu pendant 10 mois pour cause de surcroît de travail, depuis janvier mon blog est devenu prioritaire en renonçant à de petits projets de traduction chaque fois que c’était faisable.
Tu as une ligne éditoriale précise? De quoi parles tu ? Comment procèdes-tu ?
Mes centres d’intérêt tournent essentiellement autour de la Toile, même
si j’ai dû élargir la portée de mon slogan : initialement « Ads & Marketing Translator », une extension d’Adscriptor si vous préférez, désormais « le Web à la loupe »,
puisque l’une des caractéristiques essentielles qu’Internet partage
avec la traduction, c’est la TRANSVERSALITÉ. En ce sens Internet et la
traduction sont des médiats (en substantivant un adjectif), des
intermédiaires : tout ou presque peut se traduire, tout ou presque peut
transiter sur Internet. Ainsi mes articles sont-ils dictés par la
veille et l’actualité : anticiper et rebondir sur ce qui m’interpelle,
sans limites ni tabous. Je ne me refuse aucun écart a priori, seul
dénominateur commun imposé : la liberté de ton.
Que t'a amené ton blog jusqu'à présent ?
Le double de travail ! Beaucoup de nuits blanches (un lien de parenté secrète avec Armand Robin…)
et de disponibilité soustraite à ma famille, parfois les réprimandes
justifiées de ma femme et les demandes non moins justifiées de Paul, mon petit garçon de 4 ans et demi qui voudrait tout le temps de son papa pour lui – comment le lui reprocher ?
Sur l’autre plateau de la balance, de nombreuses rencontres inattendues
et enrichissantes. Outre une certaine intelligence des moteurs (dont Google, primus inter pares),
et une visibilité certaine : en termes d’image et de réputation, j’ai
obtenu plus en 6 mois avec Adscriptor qu’en 2 ans avec mon site pro,
désormais moins fréquenté que mon blog !
Et quelles sont les principales difficultés que tu as rencontrées au départ ? Et aujourd’hui ?
Mis à part quelques petits problèmes en langage HTML, des broutilles,
non, pas vraiment de difficultés. Plutôt un manque de temps chronique.
Des idées plein la tête, des curiosités idem, et peu de temps matériel
pour les réaliser. Il faut bien manger. Et donc, traduire… En me
contentant d’écrire un seul billet par intermittence, alors que j’en ai
constamment une dizaine en projet. Qui plus est, en délaissant
totalement la poésie,
à mon grand regret. Mais chaque blog est un chronophage glouton, un
dévor’heures insomniaque si vous me passez l’expression, qui exige
d’être constamment en veille et en éveil, à l’écoute du moindre signe.
Que conseillerais-tu à quelqu’un qui voudrait se lancer également ?
Avoir l’envie et la persévérance, les idées claires, de l’énergie à
revendre et une motivation à toute épreuve. Et se donner les moyens de
réussir, par exemple en investissant dans le choix judicieux d’un nom
de domaine, d’un logo, d’un slogan (excellente démarche introspective),
en clair se bâtir une identité numérique, unique, professionnelle,
mature, qui affirme et revendique : « je suis moi ». Si un recruteur
vous contacte, c’est justement, essentiellement, parce que vous êtes
vous, parce qu’il a besoin de vous, autant – sinon plus – que vous de
lui.
En fait, je crois que tenir un blog emploi s’apparente au jeu du chat
et de la souris, tantôt vous êtes le chat, tantôt la souris. Partie de
chasse passionnante, où le gibier n’est pas toujours celle ou celui que
l’on croit !
Connotations négatives en moins, bloguer, draguer, c’est du pareil au
même : conquérir sa proie en la charmant sans tomber dans la flatterie,
la séduire en dévoilant ses qualités, ni trop, ni trop vite, question
de sensibilité, de mesure. Puis servir le cocktail préparé avec un
zeste d’humour, deux doigts de rire, voire une larme ou un soupçon,
tout court. Pour susciter chez votre interlocutrice, votre
interlocuteur, le désir d’aller plus loin et, surtout, de dialoguer.
Quant aux défauts, personne n’en a, c’est bien connu. :-)
Imagines que tu tires une carte chance
professionnelle : le travail de tes rêves, avec le rôle que tu désires,
dans le contexte que tu aimes, dans le secteur qui t’attire... celui
que tu ne quitterais pour rien au monde. Racontes nous à quoi tout cela
ressemblerait.
Concepteur-rédacteur / blogueur professionnel au service d’un grand groupe STIC, genre électron libre chargé de faire le trait d’union entre l’entreprise et ses utilisateurs/clients potentiels.
Autre exemple : consultant / télétravailleur pour une société étrangère
ou non, qui voudrait échanger avec les internautes francophones. En
développant par le contenu et l’interaction un positionnement original,
une signature, reconnaissables. Mon vaste background technique
m’autorise toute sorte de sujets. Un peu sur le modèle Microsoft / Robert Scoble (lorsqu’il y était encore !).
Les gens ont moins besoin de dialoguer avec une entité qu’avec une
personne clairement identifiée, quelqu’un à qui vous pouvez donner un
nom et un visage. Vous ne discutez pas avec Google, avec Matt Cutts, si.
Converser, c’est personnel, ça demande un suivi, durable,
individualisé, ou comment voulez-vous fidéliser votre prospect s’il a
l’impression de parler aux murs ? Dans ce cadre, le blog s’avère être
un outil complémentaire, précieux (dorénavant indispensable ?),
dynamique, vivant, ouvert à la dialectique. Une interface
société-utilisateurs ou marque-consommateurs offrant une présence, une
stabilité et une proximité impossibles à cibler avec un site
institutionnel. Certains politiques / dirigeants l’ont fort bien
compris…
Pour conclure, ma théorie appliquée au réel : Ask.com, désireux de
s’implanter en France, a récemment tenté de lancer son blog maison en
français, en partenariat avec Abondance. Un vrai désastre. Retiré en
moins d’un mois. Pas étonnant ! Leur premier – et seul – billet était
d’une platitude exemplaire, une énumération de banalités, un concentré
de ce qu’il vaut mieux éviter de faire ou dire. Sans caractère et sans
commentaire. Écrit en bon français, une condition nécessaire, certes,
mais pas suffisante. « Il fait beau, le ciel est bleu », est une phrase
impeccablement construite. Il n’empêche qu’elle vous donne
l’irrépressible envie de cliquer pour aller voir … ailleurs, le temps
qu’il fait ! One click away.
La formule anglo-saxonne met dans le mille. Or pour gagner des parts de
marché, un moteur comme Ask a plus que jamais besoin de nouer le
dialogue, le problème n’est en aucun cas de manquer de moyens, mais
plutôt de faire évoluer les mentalités, d’identifier les ressources
humaines clés. Ils auraient dû essayer mes services… Dommage, leur
initiative allait dans le bon sens !
Un dernier message pour les recruteurs ?
Saisissez l'occasion : Givaros.com est à vendre ! Dans la jungle du Web, l’idéal pour des chasseurs de tête :-)
Et tant qu’à faire d’une pierre deux coups : confiez-moi vos idées, je les traduirai en mots. C’est mon métier !
Retrouvez Jean-Marie sur son blog: http://adscriptum.blogspot.com/
juillet 31, 2006 dans Interviews de candidats | Permalien
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Tracked le 3 août 2006 23:47:18
Commentaires
Bonjour Bertrand,
Merci de publier mon interterview. Juste une remarque : Le Ray, en deux mots :-)
Publié par: Jean-Marie Le Ray le 31 juil 2006 12:11:12
Sympa ça, on en apprend un peu plus sur l'auteur d'adscriptor. Je vais lire ça pendant ma pause...
Publié par: effisk le 31 juil 2006 16:13:20